C'est la longueur qui compte...

Publié le par Didier Fédou

Roman ? Nouvelle ?

Un auteur débutant peut hésiter, se posera des questions aussi vieilles que les premiers forums d'écrivains amateurs sur le net : dois-je commencer par un roman ? Dois-je me faire la main en écrivant des nouvelles ? Ai-je la force de tenir une histoire sur 2 ou 300 pages ? De quoi vais-je parler ? Est-il bien raisonnable de me lancer dans cette grande saga fantasy en 15 volumes ? Pourquoi pas une trilogie ?

Je n'ai pas les réponses à ces questions. Je ne crois pas non plus qu'elles méritent d'être posées, car, et je le répète depuis des années, c'est l'histoire qui décide. Certaines seront naturellement longues, d'autres exigeront d'être courtes, d'autres encore, une fois couchées sur le papier demanderont à se faire allonger ou raccourcir. Jamais contentes.

Soyons pragmatiques : il est probable que vous vous posiez la question de la longueur pour vendre votre texte en auto-édition, ou pour une anthologie, un concours, un appel à textes. Ce qu'il faut retenir, c'est qu'une nouvelle étirée ne fait pas un bon roman, comme une bonne sauce qu'on voudrait rallonger avec de l'eau pour en avoir plus : au final, c'est dégueulasse et le plat complet est gaché.

La nouvelle, c'est une histoire courte, parce que c'est comme ça. Vous lirez des théoriciens de la littérature vous indiquant à partir de combien de mots une histoire est une nouvelle ou passe dans la catégorie des novella. Peu importe. Quelques pages, lu en moins d'une heure ? C'est une nouvelle.

La nouvelle, voilà quelques années, avait mauvaise image. Tous les éditeurs vous le disaient : impossible à vendre hors anthologies ou recueil d'auteurs bankables, pour faire du remplissage entre deux romans. Heureusement pour nous, le monde change et les nouvelles ont repris du poil de la bête, si elles en ont jamais manqué. On entendait bien l'avis des éditeurs, rarement celui des lecteurs.

Le fleurissement des forums d'écrivains en herbe leur fit la part belle, c'était facile à partager, de montrer son travail, de lire celui des autres, pour progresser ensemble. L'investissement personnel était moindre et donc plus gérable que pour un roman.

Le temps, justement, les gens ont-ils encore le temps de lire ? Avec les moyens modernes, on peut lire une nouvelle d'un auteur sympa sur son iPhone en attendant le bus, au petit-déjeuner ou à la cantine. Encore un avantage à la nouvelle.

Pour un auteur en lancement, la nouvelle est incontournable pour se faire la main, acquérir de l'expérience et se faire un nom. J'ai, comme x autres, commencé à partager mes nouvelles sur forum, les améliorant au fur et à mesure des retours des collègues. Le miracle (et je pèse ces mots) de l'auto-édition numérique a permis à ces courtes histoires de gagner des parts de marché, et de lancer des auteurs. Venez pas me bassiner avec vos préférences pour le livre papier, son odeur, les taches d'encre sur les doigts, que le numérique tue le papier et tout ça, c'est peut-être vrai, c'est aussi vrai que certains auteurs n'auraient jamais pu percer autrement, faut pas l'oublier.

Si j'en crois mes chiffres de vente, je vends peut-être dix fois plus de nouvelles à l'unité que de romans. Plus courtes (de 5 à 20 pages A4 contre plus de 150 à 200, voire 500, et oui, pour mes romans) et bien plus abordables (moins de 1 euro contre 3 à 4 pour les romans), donc plus facile à lire pour pas cher, une prise de risque en temps et en argent faible au cas où ce ne serait pas du goût du lecteur, finalement un loisir sain et peu dispendieux.

Vous êtes aspirant auteur ? Vous voulez percer ? Faites des nouvelles, et faites-le bien. Pour la plupart, mes nouvelles m'ont servi de laboratoire, pour essayer des trucs nouveaux. Varier les styles, les personnes de narration, les constructions non linéaires, exploorer divers genres, et se planter parfois, mais c'est moins dur de jeter une nouvelle ratée de 12 pages à la poubelle que le manuscrit d'un roman de 200. Croyez-moi sur parole, je le sais, ça m'est arrivé. Souvent.

Vous avez donc tout interêt à vous mettre fissa à l'art de la concision. Vous ferez très vite des progrès et aurez tout aussi vite, si vous participez activement à un forum d'entraide, des retours sur vos points forts et les points à améliorer.

Pour autant, la nouvelle est-elle préférable au roman ? Sûrement pas. Un bon roman, bien mené, bien écrit, c'est du bonheur. Ca vous fait pour quelques pièces (en numérique, hein, pour les livres papier, sortez plutôt un billet) l'évasion, le home-cinéma, la 3D, l'odorama et les sièges dynamiques dans la tête et entre les mains, et pour plusieurs heures !

C'est ainsi : une nouvelle se lit vite et s'oublie parfois aussi vite. Un roman, on peut s'attacher aux personnages, explorer un nouveau monde et s'y plaire. Ou bien les enjeux vécus par les personnages peuvent être si importants qu'on ne peut les régler en une nouvelle. Si la sauce est bonne, faut pas la délayer à la flotte, faut sortir les casseroles et en préparer plus.

C'est l'histoire qui décide ! Des pavés archi-connus (et c'est pour ça que je les prends très souvent en exemple) comme le seigneur des anneaux ou Harry potter pourraient être raccourcis sans vraiment perdre leur potentiel, pensez-vous vraiment qu'ils vous feraient autant rêver au format nouvelle ?

Alors, roman ou nouvelle ? Ainsi que je l'ai dit, il n'y a pas de réponse. Pratiquez les deux ! Si vous êtes bien écrivain, vous le ferez sans même vous poser la question. Et puis de toutes façons, mon avis ou le votre, on s'en fout : c'est l'histoire qui décide !

C'est la longueur qui compte...

Publié dans Leçon d'écriture

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Commenter cet article
L
Je préfère lire Didjay sur ma liseuse que Marc Lévy en format poche. Quoiqu'en cas de pénurie de pq, ça doit pas être évident de s'essuyer le fignedé avec une liseuse...
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N
Je pratique les 2 mais en tant que lectrice.<br /> Il est vrai que je vous ai connu grâce à une nouvelle.... et au format Kindle bien pratique à transporter.<br /> Mais bon..... Le papier, son odeur, son encre.... gna gna gna....
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D
Faut pas croire, j'aime toujours le papier et pour longtemps, on évolue un peu, c'est tout.